Souper flambé
Aux alentours de 1990 j'habitais à Hull, maintenant Gatineau.
Un
beau samedi soir d'hiver, alors que dehors floconnait une belle neige
douce et poétique, moi et le monsieur Mei Shile de l'époque décidons
d'aller souper au restaurant. Rien de compliqué : le restaurant grec
Zorba localisé, si ma mémoire est bonne, sur Montcalm pas loin du
Portage.
Le décor était relaxant. Nous étions à
peu près les seuls dans le restaurant. En s'installant sur le bord de
la fenêtre, nous pouvions voir passer les voitures qui s'attardaient
dans la rue, les gens emmitouflés de leurs mitaines et de leurs tuques,
les flocons de neige se mourant paresseusement sur le sol.
Je
connaissais la serveuse. Nous avions suivi des cours ensemble quelques
années auparavant à Québec. Comment se faisait-il que je la retrouvais
ici à Hull? Parle, parle, jase, jase en même temps qu'elle allumait la
chandelle entre moi et mon partenaire et nous donnait les menus.
J'ai
pas eu souvent l'occasion de souper aux chandelles et une atmosphère
aussi romantique m'émouvait. C'était la promesse d'une belle soirée en
perspective. Nous ne savions pas encore ce que nous allions faire après
mais ça nous ne préoccupait pas. Seul le moment présent et le doux
rayonnement de cette belle lumière tamisée comptaient.
De
quoi allais-je me régaler? Du taramosalata, cette trempette au caviar,
sûrement. Des pikilia, ces bouchées d'un peu de tout qui donnent l'eau à
la bouche? Des spanakopita, ces délicieux pâtés aux épinards dans leur
croustillante pâte filo? Des souvlakis à l'agneau ruisselants de bon jus
de viande? Nous avions l'embarras du choix et celui-ci était difficile.
Comme nous consultions le menu, une odeur de brûlé nous envahit
soudainement. Puis, j'apeçus des flammes s'élevant entre moi et mon
compagnon.
Mon menu!!! Mon menu qui est en feu!!! Au secours!!! à l'aide!!! Au feu!!!
Un
quart de seconde de réflexion: si je lâche le menu enflammé, je propage
l'incendie. Si je le fais pas, c'est moi qui flambe. QUE FAIRE? QUE
FAIRE?
Mon ami a eu le réflexe de tirer son
verre d'eau avant que le feu m'atteigne, m'inondant en même temps. Comme
c'était pas suffisant, j'ai aussi eu droit à mon propre verre d'eau. La
serveuse, toute paniquée, est accourue avec d'autre eau, un pot, et une
serviette pour m'essuyer.
J'étais réellement
catastrophée. J'aurais pu mettre le feu au restaurant. Une chance qu'on
avait pu le maîtriser à temps et tant pis pour l'inconfort des vêtements
et des cheveux mouillés. Mon compagnon a pris le parti d'en rire.
Finalement,
pour ce qui est de la nourriture, nous étions tellement sur
l'adrénaline qu'on était pas d'humeur à manger les mets ethniques et
Dieu sait comment j'apprécie la nourriture grecque. On s'est entendu
pour une pizza toute garnie tout ce qu'il y a de plus banale. J'aime
tout et je suis pas difficile. Mais mon partenaire a voulu sa moitié
sans oignons, sans piments, sans olives parce que ça lui mettait la
bouche ...en feu :-D!
© Michèle Dessureault, 2007, 2018
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